Bernard

Buffet

1928-1999

Après Matisse et Picasso, Bernard Buffet est l’un des peintres français les plus célèbres du XXe siècle, mais également l’un des plus décriés. Peintre majeur de la génération de peintres figuratifs de l’après-guerre, il est considéré par certains critiques comme un pionnier du Pop Art et de la figuration narrative, ancré dans la radicalité d’une expression nouvelle, à l’opposé de toute banalité. Buffet porte un regard puissant, souvent violent sur la réalité de la vie moderne. Son œuvre est sans tabou et sans compromis, riche d’une vision tragique et d’une facture plastique puissante. 

La peinture de Bernard Buffet ne ressemble à aucune autre. Un simple coup d’oeil, même sans lire la signature toujours très visible, atteste de son auteur. Bernard Buffet a peu à peu mis son style au point : les traits noirs, les angles, une tristesse endémique même quand il utilise des couleurs vives, une construction géométrique, qu’il s’agisse de paysages ou de portraits. Il est connu notamment pour plusieurs séries, celle des clowns, et celle des portraits de sa femme Annabel Schwob de Lure (cf notre tableau), chanteuse et ancien mannequin, muse de la deuxième partie de sa carrière. Très inspiré par les images pieuses, Buffet a offert au Pape Paul VI une série sur la vie du Christ qui est aujourd’hui toujours exposée dans une salle du Vatican.  

De même que son style était très personnel, le peintre a bénéficié d’un effet de mode dans les années 50-60. Mais comme tout effet de mode, il a passé et bien que continuant à créer dans le même esprit, il n’a plus rencontré le même succès. Sa cote est en revanche toujours restée très haute et le regain d’intérêt des collectionneurs asiatiques ne fait que la renforcer. 

Vendues dans le monde entier, ses toiles reflètent l’attrait de l’artiste pour la perfection du dessin et des couleurs et témoignent de sa persévérance, son acharnement au travail, de toutes ces années passées dans ses différents ateliers. Elles traduisent aussi la mélancolie de l’artiste, de ses traumatismes d’enfance et de l’occupation sous la Seconde Guerre Mondiale. Un certain dépouillement habite les œuvres du peintre, aucun de ses personnages à la maigreur extrême ne sourient, même pas les clowns. Les thèmes qu’il chérit, les natures mortes, les fleurs, les villes, les jardins, s’avèrent tristes et sa fleur favorite est l’épineux chardon. 

Peintre très prolifique, Bernard Buffet n’a pas supporté de voir s’amoindrir ses facultés au fur et à mesure que progressait la maladie de Parkinson qui l’affectait. En 1999, il décidait de mettre fin à ses jours. 

Un couple mythique 

Ils formaient un couple d’inséparables. Bernard Buffet et Annabel ont incarné pendant 40 ans le bonheur d’une vie commune flamboyante. Depuis leur rencontre à Saint-Tropez, en mai 1958, après avoir été présentés par le photographe Luc Fournol, ils ne se sont plus quittés. En décembre de la même année, leur mariage à Ramatuelle scellait deux destinées que seule la mort pouvait rompre. Annabel devient la muse de son époux. En 1961, une des expositions du peintre s’intitule « Trente fois Annabel ».  

Au-delà d’une extraordinaire histoire d’amour, cette femme longiligne d’une beauté androgyne aux multiples talents, dont Saint-Germain-des-Prés, à son âge d’or de l’après-guerre, fut le berceau a elle-même été peintre et comédienne, puis mannequin et chanteuse avant d’écrire plusieurs romans ou récits autobiographiques, dont « D’amour et d’eau fraîche » (où elle révèle avec courage l’alcoolisme qui frappe le couple et « leur remontée de l’enfer »), « Les vieux gamins », « Les faux Jules » et « Post-scriptum », dédié à son mari qui s’est suicidé en 1999.  

 

Frappée de plein fouet par le suicide du peintre, le 4 octobre 1999, Annabel savait que le temps qui lui restait à vivre n’était qu’un sursis. L’épouse de Bernard Buffet s’est éteinte le mercredi 3 août 2005, à l’Hôpital américain de Neuilly. Elle avait 77 ans.