YOLANDE FIÈVRE (1907 – 1983)
Sans titre, mars 1962
Accumulation de bois flottés, cailloux, terre etc… dans une boite faite et peinte par l’artiste
Signé et daté au dos en rouge
Mention au crayon de Jean Delpech sur l’encadrement
(Jean Delpech (1916-1988), peintre et graveur, ami de Yolande Fièvre et de Daniel Cordier)
65 x 21 x 6 cm
Provenance :
Daniel Cordier, Paris
Collection privée, Paris
Yolande FIÈVRE est née à Paris en 1907 et y mourut en 1983, elle évolue dans un milieu favorable à l’Art. Très jeune elle découvre l’Amérique et vivra quelques années en Égypte.
C’est une autodidacte qui étudie les Beaux – Arts de Paris en auditeur libre, elle deviendra professeur de peinture à l’école des Beaux-Arts d’Orléans jusqu’en juin 40.
Dans les années 30-40, sa peinture est d’abord figurative (portraits, paysages) avant plus tard de basculer dans l’abstraction. Elle s’intéresse au surréalisme et réalise des œuvres sur papier qui relèvent de l’automatisme.
Au gré de ses rencontres, elle se fera de nombreux amis dont Jean PAULHAN (écrivain, éditeur et critique d’Art) qui sera son confident et avec lequel elle entretient une correspondance importante. Il sera un ardent défenseur de son travail.
Bernard RÉQUICHOT qui l’influencera avec ses reliquaires, Jean DUBUFFET et l’Art Brut mais aussi Raymond QUENEAU.
Sa rencontre avec André BRETON en 1951 est déterminante pour elle et aboutit à la création de deux séries différentes qui en réalité sont liées.
La première, « les soieries fictions », ce sont des collages de soies très fines aux couleurs chatoyantes qu’elle inclue dans des boites vitrées de sa fabrication.
La seconde les « orinoscopes », ce sont des boites qui élargissent le champ d’investigation du collage par l’introduction de sables, de minuscules coquillages, de fins bois flottés, une sorte de générateur d’images.
Ses différentes rencontres et recherches amènent Yolande Fièvre à la fin des années 50 à réaliser elle-même des boites comme celle de 1962 que nous vous présentons.
Elles renferment des objets et matériaux collectés par elle sur les plages de Vendée : bois flottés, galets, éponges, et autres résidus naturels. L’artiste va intégrer des fils de fer, os, objets en argile fabriqués par elle. Elle se crée et nous invente un univers à part.
Les travaux de cette période peuvent être rapprochés du Nouveau Réalisme d’ARMAN ou de Gérard DESCHAMPS mais aussi des œuvres de Louise NEVELSON notamment avec ces boites de toute taille architecturées par des volumes empruntés à son univers, c’est le cas de notre boite de 1962 avec ces colonnes à chapiteau et ses différents niveaux en bois peint de couleurs différentes.
Yolande est une pionnière dans le domaine, elle est portée par sa passion, sculpter puis coller, échafauder des univers complexes avec des cailloux choisis, des objets laissés par la mer, la terre, les écorces.
Elle expose ses boites chez Daniel CORDIER (notre boite provient de sa galerie), qui expose également DUBUFFET, MICHAUX, BELLMER, RÉQUICHOT et DADO.
En 1961, deux de ses œuvres sont présentées par lui au MOMA à New-York dans l’exposition :
« The Art of assemblage », c’est un succès. Elle acquiert une renommée internationale qui se poursuivra par des expositions à Bruxelles, Stockholm et Dallas grâce à Iris CLERT qui reprend le flambeau à la fermeture de la Galerie CORDIER.
On retrouve la plus part de ces éléments dans cette grande boite verticale réalisée en 1962 que nous vous présentons. Depuis 1961, elle intègre la peinture dans ses boites, ce qui est le cas ici avec ce vert d’eau et l’ocre violet, faisant référence à l’Art de peindre.
Son architecture qui permet d’agencer de façon très précise les pierres, les bois flottés, les écorces, les os, qui sont collés sur cette armature en bois et qui nous font penser à un immeuble coupé par le milieu et où le spectateur voit la vie de chaque appartement avec ses habitants, ou dans un décor.
Une tendresse minutieuse voulue par l’artiste dispose ces individus grands ou petits, de face ou de profil dans cette boite à différents niveaux et hauteurs. On distingue, la tête, le corps, les traits du visage comme ce petit galet gris au milieu à gauche où l’on devine des yeux et le nez.
Un peu plus bas, on imagine une « danseuse » effectuant sa danse le bras relevé, telle une cariatide. C’est le seul élément courbe parmi tous ces personnages, peut être sommes-nous dans un théâtre à ciel ouvert, tous sont là sur des gradins pour elle. Notre regard est attiré par ce personnage déhanché qui contraste avec la rectitude des autres.
À la droite de la « danseuse », on distingue un os stylisé et poli par l’artiste en oiseau à la façon de Georges BRAQUE. Tout est calculé et pensé par elle.
Ce qui est important pour FIÈVRE c’est de laisser le spectateur s’approprier ces espaces de rêves qu’elle met à notre disposition.
Pour elle, la spiritualité a beaucoup d’importance, Dieu est partout, dans l’air comme dans la terre, l’eau ou les animaux. Son univers unique et mystérieux est aussi magique.
Yolande FIÈVRE est une grande artiste singulière et inclassable, son œuvre était tombée dans l’oubli depuis sa mort en 1983. Elle bénéficie d’un regain d’intérêt depuis quelques années et les dernières boites passées en vente publique ne font que monter !
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